Sam KEUSSEYAN-Gladiateur – Style Art-Sourd** « Les Malheureux… » s’impose comme une œuvre où la tension émotionnelle est portée par trois figures spectrales, frontales, presque totémiques. Leur présence brute, amplifiée par des couleurs vives et des traits incisifs, projette une humanité fracturée — celle des êtres invisibles, vulnérables, ou oubliés. 1. Langage visuel et écriture Art-Sourd Dans cette œuvre, Sam KEUSSEYAN-Gladiateur mobilise pleinement les codes du style Art-Sourd, un langage plastique qui articule l’expression directe, la gestualité spontanée et une écriture graphique quasi-codée. Les traits sont saccadés, hachurés, souvent proches du signe. Des inscriptions — dont « SAM », « LES MALHEUREUX » et divers fragments — scandent la composition comme une voix visuelle, un murmure graphique. Cette fusion du dessin, de l’écriture et de la peinture rappelle une communication alternative, presque tactile, où l’émotion est transmise sans filtre. 2. Trois visages : fragmentation, souffrance et dignité Les trois visages dominants constituent le cœur narratif. À gauche, un visage sombre et structuré par des lignes anguleuses évoque la douleur intérieure, la crispation, voire la survie. Au centre, un visage bleu, plus massif, semble figé dans une calme mélancolie, comme un masque qui hésite entre résistance et abandon. À droite, une figure plus effacée, presque dissoute, suggère l’effritement identitaire, la perte ou la marginalisation extrême. Ce triptyque humain crée un chorus émotionnel, une polyphonie silencieuse où la souffrance n’est jamais simple, mais multiple. 3. Couleur : douleur éclatée, énergie retenue La palette est violente, contrastée, électrique : turquoise, rouge, orange, vert acide, rose, blanc éclaté… Cette intensité chromatique n’adoucit pas les figures : elle met en lumière leurs failles. Dans l’Art-Sourd, le geste coloré est souvent un cri intérieur. Ici, les couleurs semblent repousser l’obscurité tout en révélant sa présence. 4. Composition : chaos maîtrisé et dislocation du monde L’œuvre fonctionne sur une structure fragmentée, composée de blocs, de superpositions, de lignes verticales et horizontales qui semblent emprisonner les personnages ou les maintenir debout. Cette « architecture du chaos » matérialise la lutte des individus coincés dans un environnement oppressant ou instable. Rien n’est totalement fini. Rien n’est vraiment stable. C’est précisément cette incomplétude qui porte l’émotion. 5. Thématique : humanité blessée et visibilité des invisibles « Les Malheureux… » s’inscrit dans une réflexion universelle : comment représenter ceux qu’on ne regarde plus ? Les figures de KEUSSEYAN-Gladiateur ne quémandent pas la compassion : elles exigent la reconnaissance. Leur frontalité, leur disproportion, leurs couleurs outrées les rendent impossibles à ignorer. L’artiste raconte la dureté d’une existence, mais aussi une forme de dignité brute, presque héroïque. 6. Une signature personnelle et militante Le nom « SAM » et les inscriptions répétées sont plus qu’une signature : elles revendiquent une identité créatrice, une présence dans la lutte, un geste performatif. Cette dimension affirme la place de l’artiste comme gladiateur, un combattant qui peint pour dénoncer, exprimer, libérer. Analyse faite par Eve Brice - Expert en Art Contemporain

Nom de l'artiste

Sam KEUSSEYAN-Gladiateur